![]() |
Car whash |
Étiquette : Valeur
Vendredi noir – la valeur de nos données
![]() |
And your point is? |
Et non, ce n’est pas le relatif échec de l’introduction en bourse de Facebook, c’est le lundi que le cours s’est effondré mais le fait que l’intimité de presqu’un milliards d’individus fasse la richesse de quelques uns. Et cette ahurissante histoire que le capital ne se forme plus dans la plus-value tiré de la différence de la valeur de travail et de la valeur marchande, mais dans le fait que ce sont les consommateurs qui fournissent le capital.
Nous l’avons déjà expliqué ici, (et on pourra en écouter une version audio ci- dessous) d’autres explications sont là.
Le prix d’introduction a sans doute été trop élevé, le volume aussi, les spéculations trop hasardeuses, l’avidité sans retenue. Après les consommateurs, ce sont les investisseurs qui se sont fait avoir. Les déboires de ces derniers ne ne sont que des détails face à l’essentiel. L’univers de l’information défie les droits de propriétés.
Beaucoup plus simplement, se dire que nos données, nos idées, nos inventions, nos impressions, ne sont pas des biens comme les autres, même si leur incarnation, leur matérialisation, en permet l’appropriation et la marchandisation. Il faut leurs restituer des droits négociés et sans doute renégocier les droits définis. Pourquoi les œuvres des artistes dont on croit qu’il font partie du bien commun de l’humanité devrait-il durer 70 ans ? Pourquoi pas 20 ans comme le propose Lars Christian Engström ? Pourquoi les molécules qui soignent devraient être protégée 20ans? Pour inciter leurs inventeurs à inventer et jouir d’un droit limité elles sont limitées. Ne discutons pas la durée. Juste le principe. Les œuvres de l’esprit ne peuvent être des propriétés absolues. La société s’est déjà mise d’accord sur cette idée.
On peut donner à Facebook des droits d’exploitation, on doit lui demander de rendre les dividendes au titre d’un investissement en capital. On peut accepter que ses fondateurs et premiers investisseurs s’enrichissent, faudrait-il encore qu’ils rendent au commun ce qui lui appartient. Et quelque soient les causes véritables du fiasco de l’IPO, une fin de cycle du social qui devient une fonction parmi d’autres, des erreurs d’appréciation de la véritable valeur d’une entreprise qui peine à vendre, pire une manipulation boursière, ce à quoi il faudra réfléchir est à la propriété de ces bribes d’information qui ne peuvent prétendre à former des œuvres, et dont la valeur varie au gré des circonstances et des agrégations.
PS : les sons sont issus d’une série de chroniques – ClairEco– réalisées par l’agence Moustic The Audio Agency pour le cercle de l’Obsoco auquel nous sommes ravis de participer.
Expérience, valeur et satisfaction
‘idée du marketing de l’expérience a fleuri au début des années 2000 sur un terreau plus ancien, l’intuition était forte mais sans doute imprécise et c’est sans doute pour cette raison que cette idée c’est peu à peu évanouie.
Penser l’expérience du consommation n’est pas penser à sa satisfaction et à ses remerciements émus, c’est simplement faire en sorte qu’il se sente grandit et à la prochaine occasion de consommer que son plaisir soit plus intense et son effort plus léger.
PS : un remerciement à Remi Mencarelli dont la soutenance d’HDR a suscité ces réflexions.
Microdon – vive les requins paisibles!
A lire aussi :
–A vot’ bon coeur! Msieurs, Dames… – PWYW et NYOP
– Un avenir pour les monnaies virtuelles ?
Le paradoxe facebook – addiction ou satisfaction?
—-
A lire aussi :
–Les fourmis de Facebook – I like Buttons…
–Les effets limités des médias sociaux
–Google trending : le marketing est-il en train de mourir?
La compétition par la fragmentation
Communication efficace et création de valeur – un appel à com de l’iREP
Les séminaires de l’IREP sont un moment privilégié pour réfléchir aux évolutions de la publicité en particulier et de la communication en général. La question de l’efficacité fait l’objet chaque année d’un rendez-vous spécifique.
Celui de cette année aura une saveur particulière car il se tient après un double choc : celui des médias sociaux et celui de la récession. La seconde précipitant sans doute la première même si cette dernière défie toute récession (Communication efficace et création de valeur – appel à com ici) .
Le choc de la récession s’observe de manière immédiate dans la réduction des budgets publicitaires, mais au-delà dans une relative défiance qui s’installe à l’égard de marques dont les consommateurs peuvent croire qu’elles abusent de positions dominantes. Alors qu’ils recherchent dans le low-cost, les marchés alternatifs, une vérité vraie, de ce qui vaut vraiment, l’artifice publicitaire peut perdre toute son efficacité car ses feux, ses strass, manifestent sui generis une sorte de destruction de valeur. Des coûts inutiles.
C’est un vieil argument qui fait du marketing un emballage excessif, une sollicitation dispendieuse. Tant qu’à crier vers le chaland autant que l’appel lui apporte quelque valeur. Les publicitaires ont reconnu le fait depuis bien longtemps, faisant de leur message plus que des appels à la rhétorique rodée que des spectacles qui ravissent même si le produit n’est pas acheté.
Ce spectacle a sans doute quitté certains écrans pour se retrouver sur d’autres, et les vitrines valent sans doute plus qu’une chanson.
Ce qui en période de prospérité est ce à quoi on prête attention, en période de crise est ce qui fait rêver. Mais à quoi donc rêve-t-on aujourd’hui ? D’être un autre que soi ? Ou d’être avec les autres fussent-ils différents de soi? A croire les chiffres le film Avatar en donne une indication. Que le film soit une version supplémentaire et contemporaine des Westerns ( revoyons les cheyennes de John Ford), son argument répond sans doute à l’imaginaire du temps et à une permanence de l’histoire. Il sera un très beau conte de Noël, surtout après Copenhague !
Être avec les autres, être autre que soi. Nous rêvons d’être les deux, et sans doute est là l’essentiel des réseaux sociaux qui permettent d’être avec les autres, tout en étant un autre que soi. Les nouveaux écrans permettent cela. Ne nous étonnons pas qu’ils soient nos nouvelles vitrines.
Un marketing participatif ? les lois communes du désir

Hier (le 3 décembre 2009), Fanny Reniou défendait sa thèse que Pierre Volle et Emmanuelle le Nagard ont dirigée.
Une belle thèse, riche en travaux empiriques, dont la contribution se tient d’abord dans l’identification d’un objet de recherche : les opérations de communication participative qui se sont multipliées ces derniers temps à l’exemple du vote pour la prochaine saveur de la Danette , mais encore dans l’analyse des motivations qui conduisent les consommateurs à adhérer et à participer à ces opérations. De ce point de vue, peu de surprises mais des précisions. La recherche de la gloire est un moteur puissant, tout autant que l’enjeu. Un des enseignements est que le jeu doit en valoir la chandelle. Ceux qui y participent doivent en avoir pour leur argent, et mieux encore connaître une heure de triomphe.
Mais on se doutera que s’il est indispensable qu’un certain nombre de consommateurs s’engagent dans ces opérations, ils sont généralement un petit nombre au regard de la cible concernée. Et les spécialistes savent qu’en ce domaine c’est un modèle pyramidal de la participation qui doit être retenu. Qu’il s’agisse de politique, de sport, ou de communication, au grand désarroi des promoteurs d’une démocratie participative, une proportion de l’ordre du 1% s’engage, quand quelques % soutiennent activement et que l’énorme majorité demeure dans l’observation ou simplement l’indifférence.
Si le succès de ces opérations doit se mesurer au quelques milliers de participants, ce n’est rien à la mesure des millions de consommateurs qui devraient être touchés. Il faut donc s’interroger sur ce pourquoi l’engagement de quelques-uns peut agir sur les opinions de la multitude.
Le participatif relève d’une sorte de triangulation entre l’objet de la promotion, les aficionados qu’elle séduit et la foule qui les suit. Le pan du triangle le plus important est celui qui associe les fans au public. De ce point de vue trois théories se dégagent.
La première est celle de la crédibilité, éventuellement celle de la légitimité. A l’heure où les marques constituent une écologie dense, touffue, leurs messages se dissolvent et le témoignage de quelques-uns pourraient emporter l’opinion des autres, de ce point de vue le participatif est une rhétorique du vrai, un vrai qui se confond dangereusement avec l’opinion dominante. En faisant participer à l’action quelques milliers de consommateurs, ce sont des millions qui peuvent être convaincus. La force du message est renforcée par l’adhésion des fans.
La seconde est celle de l’envie. La foule se projette dans les quelques-uns qui se sont engagés, et désire ce qu’ils ont et désiré et obtenu. Le désir, mimétique dans son essence, serait ainsi démultiplié en proportion de ceux qui l’éprouvent et le réalisent. Les milliers d’adhérents à la cause susciteraient des millions de jaloux. Les envieux emboiteraient le pas à ceux qui auraient obtenus le privilège d’une certaine reconnaissance.
La troisième est celle d’une vie par procuration. La participation des uns, qui sont ceux qu’ils sont, vaut leur engagement sans y mettre le prix. C’est une vue raisonnable si on considère que les consommateurs sont infiniment prudents, mais pas sans appétit. Ils vivraient ainsi heureusement au travers des autres une jouissance sans risque. Vertu du voyeurisme.
Il est fort probable que les trois processus coexistent, et cela pour la raison simple que les foules ne sont pas uniformes, que s’y équilibrent, plus ou moins, ceux qui se montrent et ceux qui se cachent, ceux qui s’engagent et ceux qui suivent, ceux qui agissent et ceux qui regardent. L’enigme reste de savoir pourquoi très peu s’activent et que si nombreux sont ceux qui les suivent. Est-ce une question de distribution des qualités? Est-ce le fruit d’un rapport de puissance, ceux qui s’affirment souvent dissuadent aussi ceux qui n’en ont que la volonté.
La participation dans tous les cas n’est pas un idéal démocratique, mais cette idée que dans le monde du désir, il ne suffit pas d’offrir, ni de demander, mais qu’il faut organiser dans les passions communes l’objet même du désir.
_______
credit photo : jef safi (encore! laissez-moi dire que chaque fois que je cherche une photo sur Flickr sur un sujet que je traite c’est jef safi qui arrive…mystère)
Mass Customization – un mythe moderne

Le sur-mesure de masse (Mass-customization) est sans doute un des mythes les plus persistants du marketing contemporain. La personnalisation se confond souvent avec l’idée qu’il faille ajuster les offres au plus près des désirs des consommateurs. On en oublie au passage que l’idée de personnalisation se satisfait d’offre standardisée, pourvu qu’une attention particulière, unique soit accordée au destinataire. Le sourire de la crémière valorise certainement le panier d’œufs standard que le consommateur vient d’acheter, mais c’est une autre histoire.
Restons-en donc au sur-mesure, dont les technologies de l’information rendent possible la massification et l’automatisation. Il est assez curieux de constater la popularité de cette idée, alors que l’histoire de la consommation nous montre somme toute, que les solutions standardisées ont écarté dans de nombreux domaines les solutions individualisées. Le prêt à porter a anéanti la population des couturières, la grande distribution a presque éradiqué les épiciers traditionnels, il y a bien longtemps que nos apothicaires ne préparent plus dans leur mortiers les médications qui nous conviennent pour nous tendre des doses standards sous blisters.
Naturellement on comprend que les économies apportées par ces solutions, et les coûts abaissés par l’économie d’échelle ont transformé le rapport de valeur entre le standard et le sur-mesure, et que c’est donc l’espoir qu’on puisse produire, avec les mêmes échelles et les mêmes réductions de coût, des solutions sur-mesure qui justifient cet engouement persistant.
Aurélie Merle dans une thèse soutenue en 2007 et un article de 2008 (1), montre que la valeur du sur-mesure tient en grande partie dans la valeur du produit ainsi ajusté, mais ne dépend pas directement de l’expérience participative, même si cette dernière contribue à la valeur du produit individualisé. De ce point de vue, elle soutient cette opinion. L’essentiel tient dans le produit individualisé et celui-ci a plus de valeur que le produit standardisé.
Cependant, dans les détails de la thèse, qui ne sont pas dans l’article, un fait particulier était qu’une fraction minoritaire des sujets étudiés percevait moins de valeur dans la solution individualisée que dans la solution standardisée. Ce résultat partiel et marginal dans la recherche pouvait être compris comme le fait que pour certains consommateurs le bénéfice de l’individualisation était dépassé par le coût du processus. Quand on va chez la couturière, il faut subir le temps des mensurations, cela peut être pénible.
C’est cette hypothèse que confortent deux publications récentes (2,3) en montrant l’une et l’autre que la valeur du sur-mesure est essentiellement liée aux caractéristiques du consommateur : son degré de compétence et plus particulièrement la connaissance qu’il a de ses propres critères de choix, et de son degré d’implication et de motivation.
Sur un plan plus fondamental, on doit rapprocher ces éléments du point de vue moderne de la psychologie cognitive qui rend compte que face à un choix dans lequel les alternatives sont nombreuses, la décision est de piètre qualité et souvent insatisfaisante. C’est la thèse de B. Schwartz sur les paradoxes du choix. Quand le choix est trop difficile, trop coûteux, on s’en remet au hasard! Qui n’a pas connu cette panique face à un rayon trop vaste?
Pour exposé limpide et largement développé de ce point de vue, on ira volontiers suivre la leçon de Barry Schwartz (4), dont des tests empiriques commencent à être fournis dans l’analyse des décisions sur le web. (sur un sujet proche et des voies de solution on s’intéressera à la toute fraîche Collapsed Choice Theory)
Les conséquences pratiques sont importantes. Inutile de faire participer un consommateur qui ne sait pas ce qu’il veut exactement et qui n’est pas prêt à faire un grand effort de recherche, à la conception du produit ou du service qui lui conviendra le mieux. Il risque même de se détourner des plateformes qui lui proposent ces solutions pour leur préférer des options plus frustres, dont le choix est limité. Sauf si l’on peut lui simplifier la tâche, non seulement lui offrir la possibilité d’individualiser son offre mais aussi le prendre par la main et lui prenant le moins de temps possible.
La mass-customization est sans doute une option réservée à des groupes étroits de consommateurs et des secteurs dans lesquels l’implication et la compétence sont élevées. Deux signes sont révélateurs des situations favorables : quel prix est prêt à payer le consommateur? Quel est le statut de la marque? Ainsi ce que peut faire Nike serait interdit aux autres fabriquant de chaussures.
Toute la question est au fond de savoir quelle proportion des consommateurs (d’un marché ou d’une marque) est finalement assez motivée et compétente? Il est probable qu’elle soit faible, laissant de beaux jours encore au marketing de masse. Mais c’est un point de vue à discuter !
(1) Merle A, Chandon J, Roux E. Comprendre la valeur perçue de la customisation de masse. Une distinction entre la valeur du produit et la valeur de l’expérience de co-design. (French). Recherche et Applications en Marketing [serial online]. September 2008;23(3):27-50.
(2)Bharadwaj N, Naylor R, ter Hofstede F. Consumer response to and choice of customized versus standardized systems. International Journal of Research in Marketing [serial online]. September 2009;26(3):216-227.
(3) Franke N, Keinz P, Steger C. Testing the Value of Customization: When Do Customers Really Prefer Products Tailored to Their Preferences?. Journal of Marketing [serial online]. September 2009;73(5):103-121.
(4) Schwartz, B. The Paradox of Choice: Why More Is Less. Harper Perennial, 2005.
____________
A lire aussi ici :
De la valeur au capital (client)

Et non, nous n’évoquerons pas cette transmutation fondamentale qui est au cœur de la pensée marxiste, ce passage de la valeur d’usage à la valeur marchande, même si cela reste au programme. Nous resterons plus modestes en nous intéressant à ce que comment de l’idée que chaque client est un actif de l’entreprise, on peut imaginer que la valeur de l’entreprise est celle de l’ensemble clientèle. De quoi se constitue le capital client (Customer equity) ?
En posant que le client est un actif, nous allons au cœur du problème. Si la valeur de l’entreprise est bien la somme des cash flow futurs que sa politique actuelle va générer, il est évident que cette valeur est équivalente à celle que l’ensemble de son portefeuille de client va générer en fonction de la politique qu’elle mène. Pour affirmer cela, il faut partager l’idée que dans un temps indéfini, la valeur de la firme dépend des revenus qu’elle génère, de ses investissements, et des coûts qu’elle concède pour les obtenir. Et donc que quels que soient les modèles d’affaires, la valeur de la firme se résout dans sa capacité à obtenir des flux de revenus contre des dépenses de ressources. C’est un point extrêmement discutable, d’une part parce que les revenus peuvent venir d’une autre source que celle qui motive les dépenses, c’est le modèle des marchés à plusieurs faces, mais aussi du fait que les revenus peuvent venir du fait de l’espérance d’un revenu futur, actualisé sur le marché financier, c’est le modèle des ventures Business.
Restons donc dans le cadre traditionnel, de ce qu’à terme le revenu est produit par ceux qui achètent le produit, ou le service, de la firme. Dans l’effort de valorisation des actifs, il est clair qu’il faut comparer ce que l’on investit, ce qu’on dépense, à ce qu’on espère gagner. L’investissement correspond à la dépense actuelle qui peut générer des revenus immédiats et futurs, la dépense est ce que l’on doit consacrer pour servir la réalisation des revenus immédiats. La balance se fait en comparant le cumul de ce qui est investi, plus celui qui est dépensé, au flux cumulé des revenus obtenus. La différence est exactement ce qu’on appelle le customer equity. Le capital client.
Une première intention serait comme nous l’avons analysé, de le définir comme la somme les Customer Life Time values. Mais si le capital client se limitait à cette seule sommation nous n’aurions pas défini de concept nouveau. Il faut aller plus loin. Life time Value et customer equity seraient la même chose à la base de clientèle près.
Mais avant d’aller plus loin réglons le sort d’autres formes de capital. Le premier d’entre eux est le capital de marque, un autre plus fondamental est le capital produit, je n’ose encore parler de capital relationnel, ou pire de capital social. Nous abusons du capital, le capital ne se multiplie pas, sauf dans le temps, il ne fait que s’ajouter. Le capital produit est cette quantité qui fait que les revenus de l’offre mise sur le marché moins les dépenses nécessaires pour le concevoir et le produire, génèrent sur le long terme une accumulation de profit positive. Le capital de marque est dans le même esprit, cette différence qui s’ajoute parce que la marque permet de pratiquer des prix plus élevés ou de retenir l’attention d’un plus grand nombre de consommateurs. Le capital d’innovation est de même nature. Les uns et les autres ne s’ajoutent pas au capital client, ils ne font que le composer. Nous pourrions simplement concéder que dans la nature même de la relation établie avec les clients, il y a une source de valeur qui excède celle que produit la fonction, plus celle que produit le symbole, cet excès représentant la qualité particulière de la relation que la firme établit avec ses clients. En imaginant qu’on apporte les mêmes fonctionnalités que les concurrents, en imaginant qu’on leur apporte la même réputation, le fait de valoir plus que les autres, ne pourra provenir que de ce qu’on a établit une meilleure relation que les autres.
Dans cette conception la valeur client est la valeur de la firme, même si elle peut être décomposée en une valeur de l’offre, une valeur de la marque et une valeur de la relation.
Le capital client est donc clairement égal à la valeur de la firme, en ce sens qu’il représente la somme des cash-flows actualisés. La différence n’est pas de nature, mais dépend du mode de calcul. La valeur de la firme s’évalue à partir d’un indicateur comptable synthétique, celle de la clientèle à partir d’un indicateur agrégé. D’un côté on agrège les profits par unité de temps, de l’autre par unité d’actif productif. Voilà pour une définition générale. Il faut maintenant s’intéresser à la décomposition de ce capital client, généralement désigné par la terminologie de customer equity.
La part essentielle naturellement est constituée de la somme des cash-flow futurs générés par les clients d’aujourd’hui, compte-tenu de la politique menée actuellement. Mais cette politique menée actuellement ne se contente pas de maintenir les clients existants. L’agrégation de leur valeur bien sûr nécessite de prendre en compte des phénomènes de cohorte, les vagues successives de nouveaux clients. C’est un détail technique. Le point principal est que la politique actuelle induit le recrutement de nouveaux clients, élément que les modèles de CLTV ne prennent pas en compte. Le customer-equity se définit donc dans la sommes des cash-flow futurs générés par la base de clientèle actuelle, plus ceux de la clientèle future, compte de la politique actuelle de marketing. Celle-ci comprend la politique d’acquisition, de rétention, de développement, mais aussi de manière fondamentale la politique de création de valeur pour le consommateur.
En distinguant ces catégories nous mettons l’accent sur le fait que les dépenses marketing sont relatives d’une part à une offre de base, qui peut susciter un plus ou moins grand potentiel de demande, et d’autre part à des actions de stimulation qui peuvent accélérer ou ralentir l’accès au potentiel. Les dépenses d’acquisition ou de rétention ne font finalement que déterminer la vitesse à laquelle la firme atteint son potentiel de marché dans la limite de ce que ces dépenses peuvent aussi affecter le potentiel.
Mais ne raffinons pas trop le raisonnement, le capital client est ce flux de cash-flow constitué par les clients actuels, et les clients futurs que la politique marketing actuelle laisse à espérer. Il faudrait simplement ajouter ces clients que les clients actuels et futurs vont par leurs comportements, leurs opinions, leurs recommandations ajouter à la population que l’on gère actuellement. Dans une analyse précédente nous avons refusé d’ajouter leur contribution à la CLTV. Nous pouvons nous en expliquer maintenant. Sur le principe il aurait été assez raisonnable d’ajouter cette contribution à ceux qui en sont les inducteurs, mais cela reviendrait dans notre décomposition à comptabiliser cette contribution dans la valeur créée par les consommateurs actuels. Et donc à sous estimer l’efficience des investissements et des dépenses.
En séparant cette contribution on donne un visage plus réaliste à ce qui forme le capital client : la somme des gains futurs produit directement par les clients acquis aujourd’hui, plus celle des clients que notre politique d’acquisition aujourd’hui va permettent d’atteindre demain, et enfin ceux que l’offre de base, la marque et la qualité de relation, vont produire sans qu’on ait fait d’effort directement vers eux.
Ainsi nous pouvons défendre l’idée que le capital client ne se confond pas avec celle de la somme des CLTV mais la déborde. Et au passage un ratio du type CE/n*CLTV serait un bon indicateur de la capacité à générer des externalités de clientèle.
En étendant cette idée, on pourrait même mieux comprendre des modèles d’affaire moins traditionnels. Autrement dit ceux dans lesquels la valeur de client est quasi nulle, mais par ses effets secondaires, génère des revenus dérivés très élevés comme cela est le cas dans les marchés à plusieurs faces. Si la life time value des usagers de Google est clairement négative, le customer equity à la lecture des résultats est très largement positif.
Mais restons sur notre ligne principale, celle de business-model traditionnels dans lesquels la valeur se constitue dans la différence entre les investissements consentis pour servir une clientèle et les revenus qu’elle génère directement. Le paramètre clé est ici la politique d’acquisition, et de la même manière que nous avons défini une CLTV optimale, nous pouvons définir un CE value optimal, qui sera déterminé par la meilleure combinaison entre les investissements destinés au renouvellement de la base de clientèle et au maintien de l’ancienne.
Mais il n’y a pas d’isomorphisme. Il est raisonnable ainsi de penser que si client par client, nous devions penser qu’il faut mieux investir sur la fidélisation, à l’échelle du portefeuille c’est l’acquisition qui deviennent la priorité. Dépenser beaucoup pour plus que renouveler la base de la clientèle pourrait être compatible avec l’idée de dépenser peu pour acquérir chaque client, un budget d’acquisition élevé est compatible avec une dépense par client actif qui soit faible. Une telle situation se comprend dans la mesure où dépenser peu en moyenne pour acquérir un nouveau client, laisse espérer que celui -ci ait une forte valeur, dépenser beaucoup au total signifierait juste d’élargir considérablement le marché potentiel.
Voilà qui milite pour une idée simple, l’intérêt du concept de customer equity concerne un aspect stratégique du marketing, quand celui distinct du CLTV relève essentiellement d’un problème opérationnel.